« Pour continuer, autorisez-vous l’application à accéder à votre géolocalisation ? » Tous les détenteurs de smartphone ont déjà fait face à ce message lors de l’ouverture d’une application. Une demande qui peut sembler envahissante mais qui pourtant est nécessaire pour apporter de nouveaux services, tant pour les entreprises que pour les utilisateurs. L’apparition de cette question marque l’entrée dans la nouvelle ère du géomarketing.
Origines du géomarketing
Le géomarketing a une histoire assez récente. Sa vocation principale est de générer des cartes devant conduire à des analyses sur les habitudes de déplacements et donc de consommation d’une population. Il est apparu en même temps que les premières diffusions publiques des données de recensement ou de données démographiques institutionnelles.
Son objectif est de
- Quantifier l’impact de l’implantation d’un point de vente sur la consommation et la concurrence. Il permet d’identifier les performances d’un produit (ou service) en s’appuyant sur la provenance de ses consommateurs.
- Optimiser les efforts de communication (marketing) pour influencer les habitudes de déplacements et donc de consommation.
A ses débuts, le géomarketing s’appuyait sur des cartes illustratives qui étaient caractérisées par des histogrammes et camemberts montrant beaucoup de défauts dont un principal : le manque de précision de la représentation due à un faible volume de données.
Les conclusions tirées de ces cartes n’étaient alors que théoriques. Une étude ne pouvait entièrement reposer sur des données aussi imparfaites.
L’évolution dans les méthodes de collecte de données
Plus récemment, la création des bases de données OpenData et leurs acquisitions par les professionnels du géomarketing ont apporté au géomarketing un nouveau souffle et lui ont permis de proposer de nouveaux outils aux commerçants.
En parallèle, pour pallier l’imprécision des données que les recensements proposaient, des acteurs du géomarketing ont cherché à développer de nouvelles méthodes de collecte de données qui ne pouvaient pas se trouver dans des bases de données existantes.
L’analyse des flux de populations (par exemple les flux piéton) fait alors son apparition. Cependant, elle est passé par plusieurs étapes avant d’aboutir à un modèle efficace.
Les comptages manuels
Des enquêteurs sont envoyés compter manuellement, et parfois interroger, les passants devant un point précis (comme une future implantation commerciale).
Ces enquêtes terrains présentent deux défauts :
- La précision: il est impossible pour un enquêteur de rester concentré pendant une journée entière à compter des piétons. Il faut donc prendre en compte une large marge d’erreur dans les résultats obtenus.
Par ailleurs quand des questions sont posées aux passants (par exemple sur les raisons de leur présence, leur destination ou leur lieu d’habitation), ne seront collectées que les réponses des personnes ayant accepté de s’arrêter quelques minutes. Ce qui implique un biais important dans la représentativité des différents profils présents. - Le prix : financer ce type d’enquête reste inaccessible à la majorité des acteurs économiques, ils sont donc très rarement inclus dans une étude de marché d’implantation, et encore moins lors des études sur les lieux où faire de la publicité.
Capteurs et caméras
Les innovations technologiques ont permis aux compteurs électroniques de voir le jour. Ce système repose sur des capteurs ou des caméras mis en place à proximité d’un point de vente ou d’un panneau d’affichage.
Dès qu’un passant entre dans le champ de vision d’une caméra ou est capté par les senseurs, il est comptabilisé.
Si la précision de ces capteurs semble s’améliorer jusqu’à donner des résultats relativement précis, le prix de ce type d’équipement reste une barrière. Une couverture totale serait hors de budget voire physiquement impossible.
Cette méthode n’apporte malheureusement aucune information sur les raisons de la présence des passants, et leurs lieux d’habitations. Le résultat obtenu n’est donc que partiel par rapport aux réels besoins des commerçants.
Les données d’opérateurs Telecom
Les opérateurs proposent depuis quelques années des informations de mobilité basées sur les géolocalisations de smartphones. Cette localisation se fait par le biais de triangulation des téléphones grâce aux antennes relais.
Grâce à votre réseau un opérateur peut deviner votre emplacement et le communiquer à différentes marques. Toutefois aucun opérateur ne va transmettre de données qui pourraient vous identifier. Vos géolocalisations sont mélangées à celles de milliers d’autres smartphones. La précision est aussi adaptée pour s’assurer qu’à aucun moment vous serez le seul à être comptabilisé dans une zone.
Ces données seront alors accessibles sur des plateformes ou sous la forme d’études de marché. Cependant ces données sont très coûteuses et présentent, elles aussi, une faible précision due aux règles de confidentialité. Les opérateurs ne peuvent pas proposer une géolocalisation plus précise que 1km car ils n’ont pas reçu l’accord des individus pour partager ces données.
De la géolocalisation aux déplacements : la nouvelle source de collecte de données
La plus grande innovation de ces dernières années dans le géomarketing est la possibilité d’analyser les déplacements de millions de smartphones par leurs géolocalisations GPS.
Les professionnels du géomarketing ont donc désormais de nouveaux moyens d’identifier et profiler les chalands grâce à l’utilisation de ces données de géolocalisation anonymisées de smartphones. Cette solution devance alors toutes les précédentes en tout point. Cette évolution s’est faite grâce à l’apparition de nouveaux acteurs cherchant à fournir les données les plus fiables et les plus précises possible, pour une fraction du coût des études et des capteurs.
Les nouveaux acteurs du géomarketing proposent donc des solutions moins coûteuses et beaucoup plus précises dont les commerçants et professionnels du géomarketing peuvent profiter. Le développement des applications mobiles a permis l’accès à un nombre torrentiel de données permettant de recréer virtuellement un environnement spécifique grâce aux zones de chalandises et aux flux de mobilité.
Avec l’accord donné par les utilisateurs de smartphones, les acteurs du géomarketing sont dans la capacité de récolter des données de géolocalisation anonymisées qui, une fois traitées, retraceront les déplacements de millions de personnes. Ainsi, ces nouveaux flux entrent sur le marché et proposent de voir le géomarketing à travers un tout nouveau prisme.
Le flux de déplacement, la nouvelle donnée du géomarketing
Comme son nom l’indique, le flux de déplacement permet d’analyser les déplacements piétons/voitures/rails réalisés ponctuellement ou régulièrement. Il permet de retracer les trajets de personnes géolocalisées qui vont apporter des informations essentielles.
Il permet aux commerçants de mesurer les déplacements devant leur point de vente (même avant l’ouverture du point de vente), la provenance de leurs clients et l’impact de la concurrence sur ces déplacements. Les professionnels du géomarketing peuvent aussi en profiter en fournissant une analyse du marché beaucoup plus détaillée à leurs clients.
Bien plus précis qu’un comptage manuel et bien moins coûteux qu’un comptage par senseur, la modélisation de ces flux se fait grâce à l’analyse de données GPS de millions de smartphones.
Fiabilité et précision en sont les maîtres mots. Leurs données sont basées sur des comportements réels qui, couplés à des algorithmes, vont dissocier les flux piétons des flux rails, voitures. Les smartphones sont ainsi devenus les nouveaux outils de mesure du géomarketing et des flux de déplacements.
La nouvelle dimension des zones de chalandise
La zone de chalandise se mesurait usuellement via des enquêtes en points de vente ou l’utilisation de programmes de fidélité. Si le point de vente n’était pas encore ouvert, les analyses ne se basaient que sur des estimations de zone basées sur les temps de déplacement théoriques des chalands : les zones isochrones.
Cependant, un problème demeurait. Ces zones ne montraient pas l’impact des barrières géographiques, sociologiques et psychologiques qui influencent les déplacement qu’un client accepte de faire vers un commerce. La zone isochrone et la zone de chalandises pouvaient alors présenter de nombreux points de différence.
Les acteurs du géomarketing ont alors pensé à créer une zone de chalandise dans une nouvelle dimension en y ajoutant les données des flux de déplacements. L’ajout de ces données a alors permis de visualiser les déplacements des chalands autour d’un point de vente, de les comptabiliser et d’en identifier la provenance.
L’intelligence artificielle dans le géomarketing
L’exploitation de la dimension spatiale par le géomarketing a un impact sur tout le cycle de vie d’un point de vente, de son ouverture à sa fermeture. Les bases de données d’aujourd’hui sont elles aussi composées d’une dimension spatiale. Le développement des smartphones et des IoT a créé cette nouvelle dimension.
L’intelligence artificielle va révolutionner les méthodes de prévision d’emplacement commerciale. Elle devrait avoir la capacité de valider ou infirmer le choix d’un emplacement commercial en faisant appel à des données de déplacement en temps réel et d’une précision sans précédent. Elle pourra déduire, grâce à ces données, le meilleur emplacement commercial propice pour un certain marché et constituer une véritable alliée dans l’aide à la décision. Le géomarketing est donc constamment repensé grâce à l’IA et propose des données de plus en plus fiables et précises qui seront bientôt accessibles en temps réel.
En bref, ce qu’il faut retenir de l’évolution du géomarketing :
Le géomarketing proposait des cartes qui ne se fiaient qu’à une seule source de données. Leur précision et leur fiabilité ont alors été remises en question car trop théoriques. Les méthodes de collecte ont dû évoluer. Les comptages manuels, les caméras et senseurs ne répondant pas suffisamment aux problématiques du géomarketing, les professionnels ont dû s’adapter. Grâce à la géolocalisation de smartphones, le géomarketing compte désormais des flux de déplacement de qualité et instantanés. Cependant, le géomarketing n’en n’est qu’à ses débuts. L’intelligence artificielle et les données en temps réel lui prédisent un avenir prometteur.